Robert Ramser

Robert Ramser

© Robert Ramser 2018

Le titre de cette série photographique « Nombreuses sont mes naissances passées » est emprunté au fameux poème épique indien : la Bhagavad Gitâ. Issu du Mahabharata, livre sacré considéré comme l’un des textes fondateurs de l’hindouisme, il enseigne l’accomplissement de soi dans le cycle de renaissance, la quête de plénitude dans le quotidien, le but d’une existence idéale, s’il est possible de le résumer en quelques mots…

http://robert.ramser.pagesperso-orange.fr/

Cet ensemble de photographies argentiques est en effet né d’une expérience Indienne au cours de laquelle Robert Ramser a pu sentir la fragile frontière entre vie et mort, et l’immense frontière qui peut séparer les êtres de ce monde… Le photographe voyageur nous offre ainsi sa réflexion sur l’existence, au travers d’une lente et sombre déambulation dans un univers où les êtres vivants, « laissés pour compte » semblent flotter déjà comme des fantômes. Dans « Nombreuses sont mes naissances passées » la vie débute comme une envolée d’oiseau mais, comme le disait Heidegger, dès qu’un homme est né, il est assez vieux pour mourir. Les vies saisies par Robert Ramser semblent donc ici-bas condamnées d’avance. Notre monde ne fait d’elles qu’une succession d’errances vers une lumière, temporelle ou spirituelle qui ne parvient à l’homme que filtrée par le brouillard et la pollution, comme une métaphore aux chimères qui gouvernent nos vies et les empêche de s’accomplir idéalement. Ainsi, les ombres désolées qui hantent ces images finissent fatalement par vieillir puis disparaitre sous l’œil de leur descendance qui les accompagne jusqu’au bord du Gange… vers le voyage suivant.

© Robert Ramser 2018

Les 10 questions Conf' à Robert Ramser

1

Qu’aimeriez-vous nous dire pour vous présenter en quelques mots ?

Je suis un photographe voyageur et je travaille essentiellement en argentique noir et blanc. Le thème récurrent de mes projets est de montrer des hommes en interaction avec les lieux dans lesquels ils vivent.

 

2

Quel est votre parcours photographique ?

J’ai découvert la photographie au début des années soixante-dix lors des premières Rencontres d’Arles. Autodidacte en photographie, je me suis formé à travers des contacts avec des artistes de renom, notamment le photographe américain Charles Harbutt qui fut le président de Magnum Photos dans les années 70 et qui m’a beaucoup influencé.

3

Pour vous qu’est-ce qu’une bonne photo ?

C’est une image qui m’émeut, humainement mais aussi artistiquement, qui se révèle à mesure que le regard la parcourt, qui laisse une part de rêve et de mystère.

4

Comment naissent vos photos (prises de vue, traitement, impressions) ?


J’ai expérimenté le numérique en 2009 mais je n’y ai pas trouvé ce que je cherchais, je trouvais qu’il y manquait du mystère et ce modelé incomparable du film argentique moyen format. Je suis donc resté fidèle à mes vieux appareils analogiques. Je prends généralement peu de photos (une quinzaine par jour en moyenne quand je voyage). Je réalise moi même mes tirages sur du papier argentique baryté que je vire au sélénium et éventuellement au thiocarbamide afin de renforcer la beauté des matières et de garantir des conditions d’archivage optimales.

5

Qu’est ce qui les inspire ?


L’émotion et les sentiments que je ressens au moment où le les prends, avec la conscience de capter l’éphémère.

6

Quels sont les photographes que vous admirez ?


J’aime les travaux d’Irving Penn, Diane Arbus, Mary Ellen Mark, Paul Strand et plus près de nous de Sarah Moon, Robert Frank et Max Pam.

7

Quelle photo aimeriez-vous réaliser ?


J’aimerais faire un ambrotype.

8

Quels sont vos projets actuels ?


Je tire une série d’images noir et blanc prises au cours de mes nombreux voyages en Birmanie avant l’ouverture de 2012 et que je n’avais jamais montrées.

9

Qu’avez vous envie de nous montrer lors de la prochaine édition des Confrontations ?


« Nombreuses sont mes naissances passées », titre inspiré d’un poème épique indien de la Bhagavad Gitâ, est une réflexion sur un univers sombre où déambulent des hommes et des bêtes, malades de la pollution urbaine, laissés pour compte d’une société globalisée.
J’étais parti pour un long voyage d’hiver en Inde. Un brouillard jaune, saturé de pollution, recouvrait la vallée du Gange. Tombé malade à Bénarès, j’ai eu la chance d’avoir une chambre individuelle à l’hôpital, un privilège tant étaient bondés les couloirs où se pressaient des centaines de malades et leurs familles. Cette série est née de cette expérience, de cette méditation sur la futilité de l’existence. Les images parlent de détresse, de dévotion, de la mort qui rôde.

10

Pour terminer, que vous évoque l’expression « confrontations photographiques » ?


Je crois que cela évoque pour moi un lieu d’échange avec les autres.